Dossier Soleil : le soleil, les rayons, les crèmes, les aliment amis, …


La recommandation générale qui est : « d’éviter cet été le soleil et de se tartiner de crèmes » est l’exemple parfait de médecine réductive qui mérite de figurer dans le hit parade des mauvais conseils de santé publique.

Partant du principe que « le soleil provoque des cancers de la peau », les instances officielles recommandent de ne pas se mettre au soleil entre 12 et 16 heures et d’appliquer de la crème solaire sur les parties exposées du corps.
S’il est incontestable que le rayonnement ultraviolet a une part de responsabilité dans le risque de cancers de la peau, l’histoire est comme souvent, en biologie, trop complexe pour s’accommoder de messages trop simples pour ne pas dire simplistes.

Dans les années 1980, les Dr Franck et Cedric Garland, deux médecins épidémiologistes enquêtant sur les cancers de la peau dans la marine américaine ont stupéfait le monde scientifique en montrant contre toute attente que c’était chez les sous-mariniers que l’on rencontrait les taux les plus élevés de cancers de la peau.
Depuis, les frères Garland ont montré que de très nombreux cancers, dont ceux de la peau, sont moins fréquents à mesure que l’on se rapproche de l’équateur.
Il ne fait aujourd’hui plus de doute que l’exposition chronique et modérée au soleil active la synthèse de vitamine D, qui constitue une protection puissante contre le cancer.
En août 2006, Cedric Garland a publié une étude montrant que l’exposition au rayonnement solaire prévient 16 types différents de cancers. [1]
Même dans le mélanome, qui est la forme de cancer de la peau la plus agressive, les taux de survie sont plus grands chez les patients qui rapportent s’être exposés au soleil dans le passé. [2] Non, décidément rien n’est simple.

D’UN EXCÈS A L’AUTRE

La phobie du soleil est née chez certains dermatologues vers la fin des années 1970, alarmés qu’ils étaient par la mode du toasting. C’est alors qu’on a basculé d’un excès à l’autre.
Dans les années 1980, les dermatologues ont fait la promotion de l’écran dit « total » toute l’année et de l’usage massif des écrans solaires l’été.
A cette époque ces produits n’étaient pourtant efficaces que contre les rayons UVB, laissant la peau à la merci des rayons UVA (en cause dans le mélanome) sans le signal d’alarme que constitue le coup de soleil.

Aujourd’hui encore, alors que les filtres modernes sont plus efficaces qu’auparavant sur les UVA, leur sécurité reste néanmoins douteuse.
Des études ont montré qu’ils sont à l’origine de radicaux libres – des particules particulièrement toxiques pour nos cellules. Par ailleurs l’usage intensif de crèmes solaires, les applications répétées font pénétrer dans l’organisme des composés parfois indésirables comme l’aluminium ou encore des composés qui miment les hormones femelles, sans compter qu’ils peuvent empêcher la synthèse de vitamine D.

Il y a quelques années, ces mêmes dermatologues ont mené une croisade quasi paranoïaque contre l’exposition au soleil « en été aux heures chaudes ». Il en reste de profondes traces dans les communiqués de l’Institut national du cancer.
Pourtant, les messages anti-soleil et les campagnes de sensibilisation n’ont pas permis de réduire les cancers de la peau. Plus inquiétant, de la même manière que la promotion des écrans solaires est soupçonnée d’avoir alimenté l’épidémie de cancers de la peau, celle de l’évitement du soleil pourrait accroître l’incidence de cancers de tous types en privant l’organisme de son protecteur qu’est la vitamine D.


N’AYEZ PAS PEUR
DU SOLEIL

Sous nos latitudes nous ne pouvons pas synthétiser de vitamine D entre la fin du mois d’octobre et celle du mois de mars en raison de la longueur d’ondes du rayonnement UVB pendant cette période.
La moitié de la forme de vitamine D que nous mettons en réserve est éliminée en trois semaines, et nous sommes tous en déficit à partir de novembre, les taux les plus bas se rencontrant en février.
Les mois d’été constituent une occasion unique de s’assurer de meilleures réserves. Ceci peut être fait en exposant son corps dénudé tous les jours à la mi-journée pendant une vingtaine de minutes, sans écran solaire, le visage protégé par un chapeau.
A midi au soleil d’été, on peut ainsi produire 1500 UI de vitamine D rien qu’en exposant 10 à 20% de son corps comme le torse, le dos, les bras.
Il faut ensuite, éviter les expositions dites « récréatives » (le bronzage comme but ultime), porter vêtements et chapeau, rechercher l’ombre.
La nutrition.fr déconseille l’usage systématique de crèmes solaires.

A partir d’octobre-novembre, des suppléments de vitamine D sont recommandés.

Du soleil chaque jour en été, pas d’écrans solaires sauf absolue nécessité (exposition prolongée inévitable comme le plaisancier sur son bateau ou l’agriculteur dans son champ), des suppléments de vitamine D.
Il apparaît aujourd’hui que les bénéfices d’une exposition régulière et raisonnable au rayonnement UV dépassent largement les risques qui lui sont associés.[3]


LES NUTRIMENTS AMIS DU SOLEIL

Les caroténoïdes des fruits et légumes améliorent la protection de la peau contre les coups de soleil
Plusieurs études ont montré que le bêta-carotène et d’autres caroténoïdes (par ex le lycopène de la tomate) diminuent les effets agressifs du soleil sur la peau, en bloquant partiellement les radicaux libres issus des rayons ultra-violets : l’apparition du coup de soleil est retardée, et son intensité plus faible.

Sur le plan biologique, le rayonnement solaire fait d’ailleurs baisser les concentrations tissulaire et plasmatique en bêta-carotène et autres caroténoïdes. Il est donc judicieux de consommer en été des fruits et légumes riches en caroténoïdes (carottes, épinards, fruits jaunes), voire de prendre des compléments de caroténoïdes naturels.
Attention : les caroténoïdes n’empêchent pas le coup de soleil : les suppléments apportent une protection modérée, équivalente à l’application d’une crème solaire d’indice 2 à 4.

Il est donc conseillé d’adopter une alimentation riche en fruits et légumes plusieurs semaines avant de partir au soleil, mais aussi de choisir des assaisonnements (huile d’olive, vinaigre de vin rouge) et des boissons riches en composés phénoliques comme le thé, le jus de raisin, le vin si vous êtes consommateur d’alcool (un à deux verres maximum par jour).

L’application de vitamine E sur la peau atténue les coups de soleil
L’application de vitamine E avant une exposition réduit la sensibilité de la peau aux UVB, responsables des coups de soleil.
Après une exposition au soleil, la vitamine E apporte aussi un bénéfice puisqu’elle diminue l’importance de la rougeur, et limite l’épaississement et la desquamation de la peau.
Autre raison d’utiliser la vitamine E en applications : des études chez la souris montrent que cette vitamine réduit de manière importante l’incidence de cancers de la peau. On trouve de la vitamine E liquide dans certains magasins diététiques..


LE BRONZAGE PROTÈGE-T-IL LA PEAU?

Le bronzage constitue un écran naturel constitué d’un pigment, la mélanine, qui absorbe les ultraviolets et se comporte comme une « éponge » à radicaux libres, en particulier chez les personnes à peau mate. Chez ces personnes, un bon bronzage équivaut à un coefficient de protection d’environ 10. Malheureusement, la mélanine n’est acheminée à la surface de la peau que plusieurs heures après l’exposition au soleil. La mélanine n’a donc pas le temps de nous protéger pendant ce laps de temps au cours duquel les rayons ultraviolets ont eu tout le temps de faire des ravages si vous vous êtes exposé de manière intensive.

En résumé, voici le conseil « soleil » de l’été pour vos expositions :

Une bonne exposition consiste à se mettre au soleil tous les jours en été, entre 11h et 15h, qui est la période à nos latitudes au cours de laquelle il y a plus d’UVB par rapport aux UVA, donc la bonne période de synthèse de la vitamine D, dont il faut faire des réserves avant l’automne.
Cela se fait visage protégé, en exposant le maximum de surface de peau pendant 10 à 15-20 minutes selon le type de peau et le bronzage, et sans aller jusqu’à la rougeur. Il faudrait ensuite se couvrir ou se tenir à l’ombre le reste de la journée au moins tant que la peau n’est pas capable de rester un peu plus longtemps au soleil. Les expositions récréatives de plein soleil (bronzage) sont déconseillées.

Lire un autre article sur le sujet : La diététique du bronzage

Source : lanutrition.fr, les dossiers santé et nutrition de Thierry Souccar
Bibliographie
[1] Grant WB, Garland CF.The association of solar ultraviolet B (UVB) with reducing risk of cancer: multifactorial ecologic analysis of geographic variation in age-adjusted cancer mortality rates. Anticancer Res. 2006 Jul-Aug;26(4A):2687-99.
[2] Nürnberg B, Schadendorf D, Gärtner B, Pföhler C, Herrmann W, Tilgen W, Reichrath J. Progression of malignant melanoma is associated with reduced 25-hydroxyvitamin D serum levels. Exp Dermatol. 2008 Jul;17(7):627.
[3] Grant WB, Garland CF. The health benefits of vitamin D greatly outweigh the health risks. Bioessays. 2008 May;30(5):506-7; author reply 510-1.